Triste fin
Je prends la « plume » une dernière fois pour finir mon blog.
Finir le blog pour cette période de voyage avec le bateau Somewhere. Notre
histoire avec Somewhere s’est achevée la semaine dernière à Boavista sur le
récif de la « Chave », la clef en Créole Cap verdien, la clef…la clef de
quoi?
Voilà le bateau Somewhere a échoué dans la nuit où Stéphane
en héro avait avec succès finis son périple Tarrafal Dakar/ Dakar Tarrafal et
Tarrafal Boavista. La fatigue, l’émotion, l’excitation de nous retrouver après
un mois et demi de séparation, une erreur d’attention, une erreur de la part du
copain à la radio qui lui a dit « oui tu es derrière moi« , un manque de
vigilance et c’est le drame! Somewhere heurte le récif et la houle le pousse
pour finir par le soulever et l’installer sagement sur son flan sur le récif.
Stéphane est au téléphone avec moi, il me dit « rassure toi, j’arrive, je suis
derrière Eugène et là OpOPOP j’ai touché! » et puis plus rien. La nuit fut
longue… Seul dans le bateau où l’eau monte à 1m50, où la gîte est bien plus
inconfortable qu’au pire des nav au près, la peur au ventre, la solitude et le
choc de ce qui vient de se passer. Ne pas quitter le bateau, tant qu’il ne coule
pas, ne pas quitter le bateau. Et il reste là pelotonné dans la couette mouillée
de la cabine arrière jusqu’au matin où il retrouve la radio sous l’eau écrasée
et lance des Mayday qu’Eugène reçoit. Sa femme Anne-Lise m’appelle a 6h du mat
pour m’annoncer que le bateau est échoué mais que Stéphane va bien. La maman de
Steph est avec moi, on crie on pleure, c’est pas possible, non vraiment on va se
réveiller et notre vie va reprendre. J’ai passé 1 mois et demi seule avec les
enfants à attendre Steph qui prenait des risques, qui était dans des navigations
difficiles, du travail de commerce avec le Sénégal, il faut négocier avec les
gars, charger, faire attention, faire des courses, chercher un moteur pour
untel, charger les coques d‘un petit Cata pour Herwan, les bagages qui se
rajoutent, la façon de bosser des sénégalais. Bref c’est pas une partie de
plaisir pour une première fois. Il revenait les bras chargés de cadeaux, le
ventre de Somewhere gonflé de victuailles et de choses pour les filles et tout
est parti. Notre maison a coulé, nous n’avons plus rien. Mais heureusement Steph
est sain et sauf. Il a attendu que Junior vienne le chercher en planche de surf,
parce que Somewhere est quasi inaccessible, s’il avait sauté à l’eau…en pleine
nuit, il serait mort. Mais il a attendu sous le choc et il a sauté qu’au jour,
et a embarqué sur la petite barque de Gary, un ami d’Eugène, avec deux bidons
rempli des passeport, de l’argent et les livres que nous écrivons depuis la
naissance des filles. Le plus important.
Et nous voilà dans un nouveau départ, Stéphane va chercher
ce qu’il peut, il paye des gens pour l’aider. J’y vais la première fois mais
quel spectacle désolant…et c’est dur, 20 min de vagues dans la gueule pour
arriver au bateau, ensuite une heure d’attente la peur au ventre que le bateau
s’écrase et mange ceux qui sont dedans. Les gars démontent, remplissent les
sacs, marche dans les rochers glissant avec l’eau jusqu’à la taille en portant
sur la tête. Steph ne sait plus quoi prendre en priorité, il veut tout prendre.
Gary s’impatiente, Stéphane veut charger le moteur du zodiaque il tombe sous
l’eau sous la barque, la barque heurte les cailloux, pête un truc de l’hélice
pour finir par se dégager et se tenir à une distance sûre des vagues qui
arrivent de partout en roulant sur le récif. Quelle énergie de catastrophe. On
pleure à chaude larmes sur le retour. Je n’y retournerai pas. Mais Stephane
oui…Tous les jours pendant 4 jours, avec des pêcheurs dont il faut se méfier,
ils nous volent, ils demandent beaucoup d’argent, le travail est dur, dangereux
et ils veulent un bon paiement. On se fâche on négocie et on arrive avec
quelques plumes en moins à se dire que au moins on a récupérer quelques trucs.
Tout l’électronique est foutu. Steph a bossé sur le moteur du zodiaque et l’a
sauvé, le panneau solaire aussi. Le génois, un peu de matériel de bricolage, de
soudure, les batteries. Il s’agit de récupérer pour vendre et nous refaire mais
c’est pas gagné…
Cette semaine, après avoir un peu digéré l’évènement, avoir
aussi bénéficié de l’aide de certains comme Alex qui tient la plage du Social
club: il a donné pleins de Tee-shirt, des shorts et une paires de chaussures à
Steph qui n’a plus rien comme fringues. Et aussi l’organisation d’une fête de
charité pour nous Vendredi 9 Mars, avec demande de dons pour nous, et puis des
étudiants en informatique Belges qui sont venus travailler pour la Mairie et la
maison des jeunes. Ils nous aident à faire cette chaine de solidarité sur
facebook, et pour avoir un lien internet que les touristes puissent consulter.
Somewhere est devant le plus grand hôtel 5 étoiles du monde, le Riu et 6000
personnes le prennent en photos tous les jours. Il faut réussir à les toucher,
si chacun donne un euro on peut se refaire. Malheureusement la patronne ne peut
rien faire pour nous. Je demandais pas grand-chose peut être juste un peu
panneau A4 à la réception pour donner l’histoire aux touristes de ce bateau
devant leur fenêtre qui gît sur son flan comme un animal blessé.
Donc je disais après s’être habitué à voir encore le bateau,
le savoir là posé. Le vent s’est calmé, on ne pensait plus au risque qu’il
coule…Mais la mer et la nature ignore la loi de l’attachement et continue son
inexorable mouvement de ressac et avec la pleine lune, le haut coefficient de la
marée, hier le bateau a disparu de l’horizon, il s’est affaissé, s’est disloqué
et meurt doucement. Stéphane est parti avec Gary et Junior ce matin et ils ont
récupéré le mouillage que Gary veut acheté pour son bateau, et ont constaté
« les dégâts ». Bon on va lui vendre pour 300 euros la chaine et Stef a trouvé
sur les rochers notre disque dur… On en rit presque. Mais hier quand Somewhere a
disparu de l’horizon et qu’on le pensait coulé au fond de l’eau, une autre
douleur est apparue. On pensait qu’il resterait là longtemps… Mais il est bel et
bien parti en morceaux, mangé par la houle et éparpillé par la force des
éléments. Quelle tristesse…
On est désolé, nous n’avons pas trop le cœur de le dire à
tout le monde, à vous qui êtes en France… A vous qui me lisez et qui rêver avec
nous, à vous qui nous avez aidé si souvent quand nous rentrions, à vous a qui on
a dit qu’on assumait cette vie avec ce risque de tout perdre, et bien nous y
sommes, et on voudrait plutôt vous raconter notre transat et notre réussite mais
pour le moment on ne peut que vous raconter les faits et notre tristesse.
Maintenant ne vous inquiétez pas, nous sommes jeunes et ensemble, nous ne nous
laisserons pas aller, et nous n’avons perdu que du matériel. Les parents de
Stephane sont là et quelques personnes sont d’une aide précieuse. Nous avons des
ressources et nous allons remonter la pente, mais ce blog du bateau Somewhere
sur les mers, s’achève dans ces quelques lignes avec ce voyage là.
Maintenant nous allons faire un coup, un truc sur internet
pour demander l’aide de tout le monde et pas seulement ceux que nous
connaissons. Pour sortir de Boavista, pour faire quelque chose, pour recommencer
ailleurs, autrement, pour continuer notre vie qui désormais ne sera plus la
même.
A Notre Bateau Somewhere je voudrais dire Merci de s’être
échoué sans blesser Stéphane. Merci de nous avoir tous porté à travers le monde
et nous avoir permis de vivre tout ce que nous avons vécu. Betty se sera pas né
dans son ventre, mais Stéphane en tant que Capitaine oui et Somewhere aura été
le témoin de tant de choses. Repose en paix si possible et accueille des sirènes
et des poissons merveilleux, repose toi tu as bien travaillé et nous ne
t’oublierons jamais.
Je prends la « plume » une dernière fois pour finir mon blog.
Finir le blog pour cette période de voyage avec le bateau Somewhere. Notre
histoire avec Somewhere s’est achevée la semaine dernière à Boavista sur le
récif de la « Chave », la clef en Créole Cap verdien, la clef…la clef de
quoi?
Voilà le bateau Somewhere a échoué dans la nuit où Stéphane
en héro avait avec succès finis son périple Tarrafal Dakar/ Dakar Tarrafal et
Tarrafal Boavista. La fatigue, l’émotion, l’excitation de nous retrouver après
un mois et demi de séparation, une erreur d’attention, une erreur de la part du
copain à la radio qui lui a dit « oui tu es derrière moi« , un manque de
vigilance et c’est le drame! Somewhere heurte le récif et la houle le pousse
pour finir par le soulever et l’installer sagement sur son flan sur le récif.
Stéphane est au téléphone avec moi, il me dit « rassure toi, j’arrive, je suis
derrière Eugène et là OpOPOP j’ai touché! » et puis plus rien. La nuit fut
longue… Seul dans le bateau où l’eau monte à 1m50, où la gîte est bien plus
inconfortable qu’au pire des nav au près, la peur au ventre, la solitude et le
choc de ce qui vient de se passer. Ne pas quitter le bateau, tant qu’il ne coule
pas, ne pas quitter le bateau. Et il reste là pelotonné dans la couette mouillée
de la cabine arrière jusqu’au matin où il retrouve la radio sous l’eau écrasée
et lance des Mayday qu’Eugène reçoit. Sa femme Anne-Lise m’appelle a 6h du mat
pour m’annoncer que le bateau est échoué mais que Stéphane va bien. La maman de
Steph est avec moi, on crie on pleure, c’est pas possible, non vraiment on va se
réveiller et notre vie va reprendre. J’ai passé 1 mois et demi seule avec les
enfants à attendre Steph qui prenait des risques, qui était dans des navigations
difficiles, du travail de commerce avec le Sénégal, il faut négocier avec les
gars, charger, faire attention, faire des courses, chercher un moteur pour
untel, charger les coques d‘un petit Cata pour Herwan, les bagages qui se
rajoutent, la façon de bosser des sénégalais. Bref c’est pas une partie de
plaisir pour une première fois. Il revenait les bras chargés de cadeaux, le
ventre de Somewhere gonflé de victuailles et de choses pour les filles et tout
est parti. Notre maison a coulé, nous n’avons plus rien. Mais heureusement Steph
est sain et sauf. Il a attendu que Junior vienne le chercher en planche de surf,
parce que Somewhere est quasi inaccessible, s’il avait sauté à l’eau…en pleine
nuit, il serait mort. Mais il a attendu sous le choc et il a sauté qu’au jour,
et a embarqué sur la petite barque de Gary, un ami d’Eugène, avec deux bidons
rempli des passeport, de l’argent et les livres que nous écrivons depuis la
naissance des filles. Le plus important.
Et nous voilà dans un nouveau départ, Stéphane va chercher
ce qu’il peut, il paye des gens pour l’aider. J’y vais la première fois mais
quel spectacle désolant…et c’est dur, 20 min de vagues dans la gueule pour
arriver au bateau, ensuite une heure d’attente la peur au ventre que le bateau
s’écrase et mange ceux qui sont dedans. Les gars démontent, remplissent les
sacs, marche dans les rochers glissant avec l’eau jusqu’à la taille en portant
sur la tête. Steph ne sait plus quoi prendre en priorité, il veut tout prendre.
Gary s’impatiente, Stéphane veut charger le moteur du zodiaque il tombe sous
l’eau sous la barque, la barque heurte les cailloux, pête un truc de l’hélice
pour finir par se dégager et se tenir à une distance sûre des vagues qui
arrivent de partout en roulant sur le récif. Quelle énergie de catastrophe. On
pleure à chaude larmes sur le retour. Je n’y retournerai pas. Mais Stephane
oui…Tous les jours pendant 4 jours, avec des pêcheurs dont il faut se méfier,
ils nous volent, ils demandent beaucoup d’argent, le travail est dur, dangereux
et ils veulent un bon paiement. On se fâche on négocie et on arrive avec
quelques plumes en moins à se dire que au moins on a récupérer quelques trucs.
Tout l’électronique est foutu. Steph a bossé sur le moteur du zodiaque et l’a
sauvé, le panneau solaire aussi. Le génois, un peu de matériel de bricolage, de
soudure, les batteries. Il s’agit de récupérer pour vendre et nous refaire mais
c’est pas gagné…
Cette semaine, après avoir un peu digéré l’évènement, avoir
aussi bénéficié de l’aide de certains comme Alex qui tient la plage du Social
club: il a donné pleins de Tee-shirt, des shorts et une paires de chaussures à
Steph qui n’a plus rien comme fringues. Et aussi l’organisation d’une fête de
charité pour nous Vendredi 9 Mars, avec demande de dons pour nous, et puis des
étudiants en informatique Belges qui sont venus travailler pour la Mairie et la
maison des jeunes. Ils nous aident à faire cette chaine de solidarité sur
facebook, et pour avoir un lien internet que les touristes puissent consulter.
Somewhere est devant le plus grand hôtel 5 étoiles du monde, le Riu et 6000
personnes le prennent en photos tous les jours. Il faut réussir à les toucher,
si chacun donne un euro on peut se refaire. Malheureusement la patronne ne peut
rien faire pour nous. Je demandais pas grand-chose peut être juste un peu
panneau A4 à la réception pour donner l’histoire aux touristes de ce bateau
devant leur fenêtre qui gît sur son flan comme un animal blessé.
Donc je disais après s’être habitué à voir encore le bateau,
le savoir là posé. Le vent s’est calmé, on ne pensait plus au risque qu’il
coule…Mais la mer et la nature ignore la loi de l’attachement et continue son
inexorable mouvement de ressac et avec la pleine lune, le haut coefficient de la
marée, hier le bateau a disparu de l’horizon, il s’est affaissé, s’est disloqué
et meurt doucement. Stéphane est parti avec Gary et Junior ce matin et ils ont
récupéré le mouillage que Gary veut acheté pour son bateau, et ont constaté
« les dégâts ». Bon on va lui vendre pour 300 euros la chaine et Stef a trouvé
sur les rochers notre disque dur… On en rit presque. Mais hier quand Somewhere a
disparu de l’horizon et qu’on le pensait coulé au fond de l’eau, une autre
douleur est apparue. On pensait qu’il resterait là longtemps… Mais il est bel et
bien parti en morceaux, mangé par la houle et éparpillé par la force des
éléments. Quelle tristesse…
On est désolé, nous n’avons pas trop le cœur de le dire à
tout le monde, à vous qui êtes en France… A vous qui me lisez et qui rêver avec
nous, à vous qui nous avez aidé si souvent quand nous rentrions, à vous a qui on
a dit qu’on assumait cette vie avec ce risque de tout perdre, et bien nous y
sommes, et on voudrait plutôt vous raconter notre transat et notre réussite mais
pour le moment on ne peut que vous raconter les faits et notre tristesse.
Maintenant ne vous inquiétez pas, nous sommes jeunes et ensemble, nous ne nous
laisserons pas aller, et nous n’avons perdu que du matériel. Les parents de
Stephane sont là et quelques personnes sont d’une aide précieuse. Nous avons des
ressources et nous allons remonter la pente, mais ce blog du bateau Somewhere
sur les mers, s’achève dans ces quelques lignes avec ce voyage là.
Maintenant nous allons faire un coup, un truc sur internet
pour demander l’aide de tout le monde et pas seulement ceux que nous
connaissons. Pour sortir de Boavista, pour faire quelque chose, pour recommencer
ailleurs, autrement, pour continuer notre vie qui désormais ne sera plus la
même.
A Notre Bateau Somewhere je voudrais dire Merci de s’être
échoué sans blesser Stéphane. Merci de nous avoir tous porté à travers le monde
et nous avoir permis de vivre tout ce que nous avons vécu. Betty se sera pas né
dans son ventre, mais Stéphane en tant que Capitaine oui et Somewhere aura été
le témoin de tant de choses. Repose en paix si possible et accueille des sirènes
et des poissons merveilleux, repose toi tu as bien travaillé et nous ne
t’oublierons jamais.